Moins d'insectes ?

Est-ce que les insectes disparaissent de nos champs ?

Avant d'attaquer le vif du sujet, une anecdote. Saviez-vous que nos pares-brises ont été un moyen d'évaluer le déclin des insectes en milieu agro-industriel ? Dans certaines régions d'Europe, comme en Allemagne et au Royaume-Uni, c'est jusqu'à 80 % de diminution de la présence d'insectes volants sur les véhicules (source : journal du cnrs). Et si la comptabilisation de moucherons sur pare-brise à l'échelle individuelle pour mener cette enquête a de quoi faire sourire, son résultat, lui est loin d'avoir un effet comique.
On les perçoit souvent comme des nuisibles à éliminer ou chasser de chez soi, mais les insectes forment en réalité 80% des espèces animales sur cette planète.

L'effet papillon porte bien son nom

En effet, avec la disparition des insectes, c'est tout un chamboulement écosystémique qui s'opère. Perte des coléoptères ? Le bois, les feuilles et fèces ne sont plus transformés en matière organique, les habitats naturels reculent et se raréfient, les insectivores (comme 60% des oiseaux, mais aussi les amphibiens, les poissons et les chauves-souris) manquent de nourriture et le déclin se poursuit en cascade sur toutes les couches de l'écosystème.

De quoi parle-t-on lorsque l'on dit déclin ? Il semblerait pourtant que des espèces au contraire, prolifèrent.

Il y a deux types d'insectes. La première espèce nécessite un habitat précis et des ressources spécifiques à ses besoins et l'autre espèce est plus adaptable en termes de milieu comme de nourriture, on la qualifiera d'espèce envahissante. Regardons de plus près la première, dont font partie les abeilles. Ces espèces sont à 90% responsable de la pollinisation des plantes à fleurs, dont nous avons besoin pour survivre (argument qui fait mouche).

Et le déclin ? C'est l'observation de la baisse et appauvrissement du nombre d’individus, du nombre d’espèces et de la biomasse (leurs poids) sur un même territoire donné à intervalles régulières pendant plusieurs années. La revue Biological Conservation sonne ainsi l'alerte en établissant l'analyse de 73 études sur la faune entomologique, et concluant que 30 % des espèces d’insectes sont menacées d’extinction.

Quelles en sont les causes ?

On relie le déclin des insectes au modèle d'agriculture intensive, notamment à cause de l'utilisation d'intrants tels que les pesticides, insecticides et antifongiques. Cette utilisation pour augmenter le rendement va de paire avec la perte d'habitat naturel pour les espèces suite à l'expansion de l'activité humaine. Le pesticide visé : les néonicotinoïdes.

"Le Bad Bzz, la condamnation de l'humanité, le tueur d'abeilles"
Ils avancent sous pseudonyme, mais les néonicotinoïdes sont des substances insecticides qui peuvent être notamment utilisées dans l'agriculture. Elles se diffusent dans toute la plante pour la protéger des ravageurs, utilisée en granulés, en traitements de semences ou en pulvérisation (source Anses).

Une interdiction... fragilisée

De 2013 à 2019, leur interdiction progressive est demandée et votée par l'Union Européenne. À ce jour, seule l’acétamipride est autorisée au niveau européen, mais la France fait un cas d'exception, la culture de la betterave, pour laquelle, elle issue des dérogations entre 2021 et 2022 d'une durée de trois ans, pour un usage limité. Aujourd'hui, on estime que près de 100 milliard de graines enrobées de néonicotinoïdes entre 2021 et 2022 (source, l'association : agir pour l'environnement).

Réouverture du cas français : en décembre 2022 au congrès des planteurs de betteraves, le Ministre de l'Agriculture avait ainsi annoncé les autoriser à nouveau en 2023. Ce ne sera finalement grâce aux pressions de la justice européenne que la France renoncera à réautoriser les néonicotinoïdes en janvier 2023 (source Le Monde).

L'agriculture bio et l'agriculture régénérative pour sauvegarder les insectes

Solution : trouver des alternatives aux néonicotinoïdes, adopter un mode d'agriculture biologique et vers l'agriculture régénérative permettant une sauvegarde de la biodiversité.

La preuve, par le terrain avec Omie

Les relevés entomologiques chez nos partenaires
En avril 2024, l'objectif était de faire des relevés dans ce verger. En faisant ce relevé, il nous faut identifier s’il y a des auxiliaires, à savoir les alliés dans la production agricole. C'est-à-dire des insectes qui vont aider à lutter contre d’autres insectes qui attaquent les productions (contre la punaise prédatrice dans un verger par exemple).

Nous allons également regarder s’il y a des espèces spécialistes, la fameuse première catégorie d'insectes dont nous parlions plus haut, comme les syrphes, qui peuvent être accompagnées d'auxiliaires généralistes et plus adaptables, comme les araignées.
Cela permet, s'il y a une bonne population d’auxiliaires spécialisés, à l’agriculteur en agriculture biologique de décider de ne pas traiter. Notez que l'agriculture biologique est sans intrant de synthèse, mais qu'il est nécessaire d’avoir une bonne technicité dans la gestion de ses traitements sans pesticides, afin d'assurer la vie de ces auxiliaires. Exemple ? En évitant un produit assez fort, par exemple celui à base de neem, 2-3 semaines avant la dite saison des insectes, ce qui pourrait détruire leurs cycles.

Comment encourager la biodiversité dans ses parcelles ?

La présence d’auxiliaire dépend à 50% des plantes cultivées au sein de sa parcelle et à 50% du paysage (notamment de la présence de lieux sauvages, comme des haies ou des lierres autour des poteaux des vergers par exemple, et d’eau). Un couvert peut attirer les spécialistes nécessaires à sa culture (ex. avec de l’Achille millefeuille).

L'un de nos agriculteurs partenaires a semé un couvert pour encourager sa biodiversité. Donc, il a mis très peu de graminées qui aident la portance du sol et a opté pour une stratégie de semis d’espèces ayant des floraisons alternées et étalées dans le temps pour apporter un gîte et un couvert le plus longtemps possible à ces auxilaires.


Est-ce possible pour toutes les productions, toutes les parcelles ?

Tout dépend de votre point de départ : un système sans biodiversité est un système qui a besoin de retrouver son équilibre. Alors les premières années, on pourrait perdre quelques arbres et une partie de notre production, le temps que le ravageur de notre ennemi revienne. Dans ces cas, il faut penser systémique et laisser le temps, tout en encourageant le retour d’animaux divers et variés (les chiroptères, communément appelés les chauves-souris, les oiseaux comme les mésanges, qui mangent les mouches, voire les renards, qui s’attaquent aux lapins etc.)
Installer des ruches, le symbole de la biodiversité : une idée reçue 
Crédit photo : Abeille de Brenne

Premièrement, il s’agit de l'abeille domestique, qui est une espèce très compétitrice. Deuxièmement, ramener plusieurs ruches dans des vergers, c’est comme ramener un troupeau de vaches Prim’Holstein dans une forêt, ça n’encourage pas la biodiversité locale, et cela ne règle pas le problème premier.

Est-ce diminuer son rendement que de prendre soin des insectes ?

Sans surprise : non. D'après les conclusions d'une étude scientifique menée par l'Inrae et l'Itab nommée Indicateur prédictif des impacts des systèmes agricoles sur la biodiversité locale, la création d'habitats naturels pour les espèces permet d'augmenter le rendement de zones cultivées dès 6 ans.

Malgré une perte de surpercifie cultivée au bénéfice de la création de ces habitats, le rendement a été maintenu voire augmenté. Cette étude démontre donc clairement qu’une gestion respectueuse de la faune et de la flore, qui soutient les services écosystémiques, est compatible avec les rendements des cultures et peut même les augmenter.

Et chez Omie ?

C'est toute la pensée qui nous anime chez Omie, chaque jour, dans la conception de nos produits biologiques et pour le soutien à la transition de nos partenaires vers l'agriculture régénérative, incluant la préservation de la biodiversité, de l'eau et des sols.
Sources citées et utilisées dans cet article :
- Le journal du CNRS, Le monde, L'anses, National Geographic, Agir pour l'environnement, Reporterre, L'étude de l'INRAE et de l'ITAB.